Au moment de la rédaction de cette introduction, le dépôt de bilan de la maison d’édition Eclipse rend incertain le sort du premier roman traduit en français d’Adam Troy Castro, Emissaries From The Dead. Les lecteurs français qui se réjouissaient de découvrir la série d’Andrea Cort devront malheureusement encore attendre. Pour les faire patienter, Angle Mort, après la très remarquée Véelles dans le n° 2, publie une autre nouvelle choc de l’auteur américain : Les mains de son mari. Castro fait une nouvelle fois mouche avec sa façon d’aborder le réel et ses traumatismes par une science-fiction aux limites de l’absurde.
Les mains de son mari
de Adam-Troy Castro
Les mains de son mari arrivèrent à la maison un vendredi. Rebecca avait été informée de l’attaque qui avait coûté la vie à sept soldats de l’unité et en avait réduit trois autres, comme son époux, à des fractions minimales d’eux-mêmes : un homme à qui il manquait la partie supérieure du corps, un deuxième dont le bas avait disparu, un troisième tranché en deux net, semblable aux sections en coupe exposées dans les laboratoires d’anatomie.
Le ministère des Anciens combattants lui avait dit que cela aurait pu être pire. L’officier chargé de lui annoncer la blessure de guerre lui avait rappelé le cas de Tatum, la fille de ses voisins, si diminuée par son propre passage au combat qu’il ne restait d’elle qu’une petite bande de peau et de muscle : une partie de la cuisse, d’à peu près la taille et la forme d’un paquet de cigarettes, renvoyée à ses parents dans une boîte. Elle vivait maintenant dans leur chambre, au premier étage, et gagnait sa croûte en corrigeant des articles sur Internet. Ça n’est pas une vie, avait commenté le militaire. Cependant, avait-il souligné, il subsistait de Bob une paire de mains parfaites, certes amputées, mais encore capables d’accomplir beaucoup de grandes choses. Et il restait toujours la loterie du clonage. On y avait une chance sur un ou deux millions de gagner, mais cela maintenait l’espoir. On avait déjà vu des choses bien plus étranges.
Rebecca avait demandé à leurs parents respectifs, ainsi qu’à leurs amis, de les laisser tranquilles. Ils allaient vivre un moment intime, et elle n’était pas sûre de pouvoir supporter leurs platitudes attentionnées. Elle attendit à la maison, avec une envie de fumer dépassant tout ce qu’elle avait jamais connu, le regard fixé sur la porte jusqu’à ce que l’on frappe enfin. Deux soldats aux uniformes élégants lui apportèrent alors, dans une boîte recouverte d’un drapeau américain, ce qui restait de son mari.
Ils l’ouvrirent puis lui montrèrent les mains de Bob qui reposaient, côte à côte, sur un coussin blanc. La gauche avait la paume tournée vers le haut, et pour l’autre, c’était l’inverse. Dès qu’elle vit Rebecca, la première tressauta et agita les doigts. Les ouvertures photosensibles neuves situées au bout des doigts clignotèrent plusieurs fois, indiquant sans doute de l’excitation. On en avait manucuré et poli les ongles pour les rendre très brillants. Inévitablement, Rebecca posa les yeux sur les poignets qui se terminaient en d’épaisses bandes argentées, très semblables à des bracelets… sauf au niveau du fond plat où auraient dû se trouver les avant-bras. Rebecca savait qu’ils ne contenaient pas seulement le système de maintien en vie – sans lequel les mains de son mari n’auraient été que de la viande pourrissante – mais aussi la sauvegarde la plus récente de sa mémoire, sans laquelle tout ce qu’il avait été, tout ce qu’il avait fait, aurait complètement disparu.
Elle n’avait pas imaginé qu’une paire de mains aurait assez de personnalité pour qu’on puisse l’identifier, mais elle la reconnut. L’un des auriculaires était tordu : Bob l’avait cassé en attrapant une balle de baseball, et il n’avait jamais tout à fait guéri. Il y avait aussi une cicatrice sur l’une des articulations, séquelle d’une coupure avec du verre brisé qui avait presque atteint l’os. Ces mains étaient celles qui l’avaient fait frissonner autrefois, se dit Rebecca. À l’époque, elles se trouvaient au bout de bras forts et réconfortants.
Les doigts frétillèrent un peu plus. L’un des militaires lui expliqua que son mari voulait lui parler, et elle répondit qu’elle ne savait pas quoi faire. Le plus jeune des soldats lui montra une tablette d’un noir mat, pourvue de creux pour les doigts. Il l’alluma avant de la placer dans la boîte, à un endroit accessible aux mains de Bob. Celles-ci se retournèrent tandis que l’écran chauffait, insérèrent le bout de leurs phalanges dans les encoches de la tablette et firent… quelque chose qui ne relevait pas de la frappe que la jeune femme connaissait sur un clavier QWERTY, mais assez proche malgré tout, avec des mouvements subtils et exercés. Pendant trente secondes environ, mots, puis phrases, se succédèrent sur le moniteur.
rebecca s’il te plaît n’aie pas peur, tapèrent les main de son époux. je sais que c’est bizarre & effrayant mais c’est toujours moi. je peux te voir & je suis content d’être de retour à la maison. je t’aime. s’il te plaît je veux que tu m’embrasses
À cet instant précis, Rebecca aurait préféré faire n’importe quoi plutôt que ça, mais elle savait que les mains de son mari sentiraient toute hésitation de sa part. Aussi se pencha-t-elle pour les toucher. Elles se dégagèrent de la tablette noire, laissèrent la jeune femme les soulever, chacune dans une de ses propres mains. Elles s’avérèrent aussi chaudes que dans son souvenir, et plus lourdes qu’elle ne s’y attendait. La nausée lui monta à la gorge lorsque, poussée par le devoir, elle déposa un gentil baiser sur leurs articulations. En réponse, chaque main se retourna dans celle qui la tenait. Les doigts se croisèrent en une étreinte aussi ferme et complète qu’elle aurait pu l’être si le sort avait décidé de laisser Bob revenir chez lui en un seul morceau.
L’un des militaires dit : « On va vous laisser tous les deux seuls. »
Rebecca ne put s’empêcher de penser : Que voulez-vous dire par « tous les deux » ? Ses mains sont maintenant deux choses séparées ; ce ne serait pas plutôt « tous les trois » ? Ou, puisqu’elles ne s’additionnent pas en quelque chose qui ressemble un minimum à l’homme entier, ne devriez-vous pas vous servir de fractions ? Me dire : on va vous laisser tous les un virgule dix seuls ? ou va savoir quoi ? Elle pensa tout cela sans le formuler à voix haute tandis qu’ils remettaient leur couvre-chef et l’invitaient à les contacter si elle avait besoin de quoi que ce soit. Ils la laissèrent seule, accrochée à ce qui avait été une partie, mais pas la totalité, de son mari. À peine quatre ans plus tôt, alors qu’elle n’avait que dix-huit ans, assise en face de lui lors d’un séminaire universitaire, il lui avait paru être le plus bel homme qu’elle ait jamais vu.
Durant un long moment, elle resta assise avec lui – avec elles – en silence. Parfois, lorsqu’elle fermait les yeux, attendant les pressions rassurantes qui s’approchaient le plus d’une conversation sans la tablette, elle parvenait presque à se leurrer elle-même. Elle imaginait que ces mains étaient connectées à des poignets puis à des bras qui rejoignaient des épaules avec une poitrine et un corps contenant un cœur battant, des lèvres, des yeux, un homme capable de dormir à ses côtés, de susciter aussi bien sa passion que sa pitié.
Au bout d’un moment, la main gauche se dégagea doucement de celle de Rebecca, grimpa sur son épaule, qu’elle serra aussi avant de ramper tel un crabe vers le visage où elle rencontra des traces de larmes sur une joue. À cette découverte, la main se figea. La jeune femme ne put s’empêcher d’éprouver un sentiment de trahison vis-à-vis de son mari, comme si elle s’était montrée superficielle, comme si elle l’avait blessé, lui ou ce qu’il en restait, à un moment où il avait besoin de savoir qu’elle était toujours capable de l’aimer.
Un peu plus tard, les mains se retirèrent vers la table pour parler avec elle des problèmes auxquels ils étaient confrontés. La gauche se retourna sur le dos de manière à capturer son visage grâce aux ouvertures photosensibles situées au bout des doigts tandis que la droite se dirigeait vers la tablette de saisie de texte pour lui dire qu’il savait ce qu’elle ressentait, que ce n’était pas non plus ainsi qu’il avait imaginé leur avenir ensemble et que, si elle lui laissait une chance, il ferait de son mieux pour être le meilleur époux possible. L’hésitation de Rebecca, sa difficulté à trouver des mots qui ne formeraient ni une caricature ni un mensonge, en disait très long, brisant sans doute ce qui servait maintenant de cœur à son époux. Mais au bout d’un long silence, elle hocha la tête et c’était un début.
Il ne pouvait rien lui révéler de ce qui lui était arrivé. La dernière sauvegarde, effectuée avant l’attaque qui avait détruit le reste de son corps, datait d’une semaine, lui épargnant les souvenirs d’une épreuve infernale passée à regarder son unité succomber peu à peu, un ou deux soldats après l’autre. Sur le clavier, il tapa qu’il possédait au mieux une connaissance théorique de ce qu’avait contenu cette sauvegarde, expliquant que, même dans cette période-là, il existait des événements qu’il avait choisis de ne pas se rappeler. Il aimait mieux continuer sa vie avec une mémoire arrêtée plus tôt, enregistrée deux mois auparavant et miraculeusement dépourvue de certaines expériences qui l’auraient traumatisé.
Il lui écrivit que la guerre avait été si épouvantable qu’il se serait débarrassé de bien plus de souvenirs si cela avait été possible ; d’ailleurs certains anciens combattants ne réalisaient une sauvegarde qu’au moment d’embarquer et, lors de leur retour en morceaux ou en entier, refusaient de se rappeler ce qu’ils avaient fait ou subi là-bas. Plutôt que de se souvenir d’une seule journée au casse-pipe, ils préféraient vivre une existence où ils passaient, sans pratiquement un seul instant de transition, de forts, en forme, entiers et sur un transport de troupes en train de coder leur passé dans une base de données, à plus vieux, libérés des obligations militaires et de nouveau chez eux, réduits à un morceau de corps conscient sur un plateau. Mais il avait des potes, des gens dans son unité qui lui avaient rendu service durant le temps passé là-bas. Il refusait de les oublier, même si cela signifiait devoir se souvenir de l’enfer. Il ajouta qu’il ne lui parlerait jamais du peu qu’il se rappelait.
Après cela, ils n’avaient plus grand-chose à se dire. Rebecca se prépara un maigre déjeuner, et les mains de son mari s’installèrent sur la table afin d’assister à son repas, les paumes tournées vers le haut pour que les bouts des doigts puissent la voir. Elles donnaient involontairement l’impression de se tenir dans une position de supplique.
Plus tard, tandis que le silence de l’après-midi s’épaississait, elles tapèrent : j’adore toujours te regarder manger. Il lui avait déjà dit cela, à l’époque où ils tournaient l’un autour de l’autre en effectuant les rites qui muent une attirance initiale en vie de couple ; il avait apprécié la méticulosité de Rebecca, sa façon d’aborder une assiette de nourriture comme s’il s’agissait autant d’un puzzle à défaire que d’un repas à savourer. Elle ne lui répondit pas qu’autrefois elle aussi avait aimé le voir manger, montrer de la joie pure en ingérant ses aliments préférés, dévorer des repas mauvais pour sa santé avec un enthousiasme affirmé, sans honte. Elle savait qu’il ne pourrait plus jamais l’exprimer, qu’elle n’en serait plus le témoin : un autre des plaisirs de l’existence qu’on leur avait volé, abandonné sur un bout de terrain sanglant sous un ciel étranger. Elle ne put se retenir de penser à tous les repas à venir, les petits déjeuners, les déjeuners, les dîners qui, pendant des années encore vierges, leur rappelleraient ce qu’ils avaient eu mais ne retrouveraient jamais.
La conversation se tarit, et ils regardèrent la télévision. Posées sur les genoux de Rebecca ou à côté d’elle sur le canapé, les mains exprimaient leur plaisir ou leur mécontentement vis-à-vis des programmes offerts par le poste avec des commentaires mimés qui, à un moment, inclurent un lever de majeur silencieux mais violent, en réponse furieuse au reportage sur la guerre d’un journaliste. La jeune femme répondit à quelques appels téléphoniques de la part de membres de la famille ou d’amis inquiets qui désiraient savoir comment se déroulaient les retrouvailles. Elle leur dit que non, Bob et elle n’étaient pas encore prêts à recevoir des visiteurs. Les heures suivantes se déroulèrent dans un silence brisé par des discussions hésitantes, rendues forcément brèves par l’aptitude limitée de son mari à taper au clavier, puis, de manière inexorable et un peu atroce, elles aboutirent au dîner. Non seulement la gêne du déjeuner s’y répéta, mais elle se doubla quand Rebecca réalisa que tout ceci ne faisait que débuter, que leurs repas silencieux deviendraient bientôt un rituel familier, pour aussi longtemps que l’avenir s’étirerait devant eux.
Un seul vrai problème advint avant l’heure du coucher. Errant sur un bout de canapé, la main droite de Bob rencontra une photo encadrée de lui-même en uniforme. Par hasard, Rebecca l’aperçut alors qu’il hésitait, tapant du doigt sur le verre comme s’il espérait plus ou moins être autorisé à revenir dans le fragment de temps figé de l’image. Quand il renversa ensuite la photo, on aurait cru qu’il l’avait fait exprès. Elle en était presque sûre à cent pour cent.
Cette nuit-là, elle s’allongea sur son côté habituel du lit, sous un plafond semblable à un espace blanc, vide, incapable de lui offrir le moindre conseil. La main droite de Bob se fraya un chemin sous les draps et s’installa contre la taille de sa femme pendant que la gauche se plaçait sur son oreiller propre, préférant la contempler plutôt que de bénéficier de la chaleur que la couverture aurait pu lui procurer. Quand Rebecca éteignit la lampe, les lumières rouges semblables à des piqûres d’épingle de la main gauche projetèrent une lueur écarlate sur tout ce qui les entourait, transformant un peu la taie d’oreiller en victime d’une hémorragie. Les doigts remarquèrent que Rebecca les regardait : ils remuèrent ; soit pour lui envoyer un bonjour perversement guilleret, soit pour lui rappeler que Bob pouvait la voir. S’obligeant à se pencher vers le coussin afin de déposer un baiser dans la paume, elle réprima plus ou moins un frisson instinctif lorsque les phalanges se replièrent pour lui caresser les joues.
Elle s’adressa à la main de Bob en utilisant son nom puis lui chuchota qu’elle l’aimait.
Sous les draps, l’autre main rampa vers celle de la jeune femme et enroula ses doigts autour des siens. Rebecca l’avait déjà tenue des heures durant, et elle aurait préféré un peu de liberté pour sa main, à présent. Mais que pouvait-elle dire, vraiment, sachant que refuser maintenant le contact, dans l’endroit le plus intime qu’ils partageaient, le jour même de leurs retrouvailles, serait revenu à rejeter son mari ? Elle devait lui donner quelque chose. Faire au moins semblant. Alors elle le serra à son tour, lui murmura quelques mots d’amour auxquels elle ne croyait pas, puis le laissa la tenir avec une main pendant que l’autre la regardait avec des yeux pareils à des blessures d’aiguilles.
Rébecca s’endormit. Dans ses rêves, elle avait aussi retrouvé les mains de Bob, mais sans les jolies bandes aseptiques qui leur permettaient d’avoir accès à sa mémoire tout en dissimulant sous de l’argent poli l’ampleur de la violence qu’il avait subie. Dans ses rêves, les mains revenaient vers elle avec des blessures déchiquetées, à vif, des lanières de chair déchirée et blanchie traînant derrière elles tels des serpentins en lambeaux. De toutes deux sortait un os noirci et fendillé, pareil à une épée. Les bouts de doigts de ces restes de Bob étaient des instruments aveugles, inutiles, incapables de le conduire où que ce soit sinon grâce au toucher. En rampant sur le sol ciré de la cuisine pour trouver la jeune femme – qui se débattait dans de l’air aussi épais que de la pâte de fruits afin de rester en dehors de leur portée –, ils laissaient derrière eux un flot continu de sang, bien plus que ce qu’auraient pu déverser de tels organes dans des conditions normales, sans être devenus des bouts de chair asséchés. La pièce se mua en frise de traces sanguinolentes tordues qui se poursuivirent uniquement sur ses jambes nues après la poursuite. Rebecca se retrouva aussi paralysée que n’importe quelle femme onirique, les pieds cloués au sol pendant que les mains désincarnées grimpaient le long de son corps.
Elle aurait pu crier pour sortir du sommeil, mais elle ne parvenait pas à respirer dans le songe. Car l’air environnant n’était pas une atmosphère respirable par un être humain. Il s’agissait d’une substance épaisse qui refusait de pénétrer la barrière de ses lèvres malgré les efforts de sa poitrine, le tonnerre dans ses oreilles, et ce désespoir avec lequel elle tentait d’aspirer quelque chose qui lui permettrait de survivre.
Elle se réveilla soudain et comprit qu’il ne s’agissait pas d’un rêve. On l’étranglait. Les mains de son mari lui serraient la gorge. Les deux pouces se joignaient au niveau de la trachée-artère tandis que les doigts, épais, puissants, s’enroulaient autour de son cou pour se rencontrer, comme dans une épouvantable conférence au sommet, derrière la nuque. Même quand il avait été un homme entier, Bob avait toujours possédé une poigne formidable. Mais ces mains, qui n’étaient que ce qui restait de lui, semblaient aussi posséder la force de ses bras et de son dos, qu’elles consacraient à accomplir l’impossible tâche létale consistant à comprimer une gorge afin de la réduire à néant.
Une femme étranglée par un homme aurait pu mourir en griffant la poitrine de son agresseur ou en cherchant à atteindre son visage, ou encore en s’attaquant aux mains elles-mêmes – qui auraient eu l’avantage d’être arrimées à des bras et des épaules. Mais Rebecca n’avait rien d’autre à combattre que ces mains sur lesquelles elle pouvait focaliser pour résister à l’assaut. Se saisissant du crayon pointu qu’elle gardait à côté du magazine de mots croisés – qui l’avait accompagnée depuis que Bob était parti combattre dans cette saloperie de guerre stupide –, elle le planta dans le dos des mains jusqu’à en entailler la peau. Les deux petits morceaux de Bob relâchèrent leur emprise, permettant à leur proie de respirer à nouveau.
Elle aurait pu hurler, continuer à poignarder les mains de son mari jusqu’à ce qu’il n’en reste plus que de la chair déchiquetée. Mais la façon dont elles reposaient maintenant sur le lit, avec dix lueurs rouges fixées sur elle, la fit s’arrêter. Cela n’aurait sans doute pas été le cas en face d’yeux déments ou vides.
Elle ralluma la lampe de chevet puis considéra les mains meurtrières de Bob dans l’éclat de la lumière crue.
Toutes les choses ont un visage, même si elles n’en ont pas littéralement ; le regard humain insiste pour leur en mettre un. Même les mains ont un visage, qui change en fonction de la position des doigts par rapport à la paume. Elles peuvent paraître calmes ou angoissées, ou désespérées ; voire parfois douces ou bestiales, alors qu’il s’agit des mêmes mains. Sans raison logique, Rebecca trouva que les mains de son mari avaient l’air perdues. Elle ne comprenait pas, mais sentait que quelque chose lui échappait. Quelque chose qu’elle pouvait presque voir mais qui se trouvait en dehors de son champ de vision.
La main droite de Bob mima un mouvement de frappe.
Rebecca répugnait à laisser ces membres seuls le temps de récupérer la tablette. Elle avait lu trop d’histoires sur des gens qui tournaient le dos à des monstres. Mais ils réitérèrent leur geste, avec insistance. Elle se rendit dans l’autre pièce, revint pour constater que les mains de son mari étaient restées là où elles étaient tombées et, méfiante vis-à-vis de leur capacité à garder leurs distances, elle jeta l’objet sur le lit.
Il tapa sur le clavier.
je suis si si désolé je ne te ferais pas de mal pour rien j’avais un cauchemar j’en ai eu depuis un bout de temps je savais pas que c’était toi j’avais mal stp comprends stp pardonne-moi stp
Rebecca n’était pas prête à lui accorder son pardon.
« Tu aurais pu me tuer. »
je sais. ce n’était pas l’homme que tu as épousé mais celui qui a vécu un enfer là-bas. quand je sais où je suis je vais bien. on pourrait sans doute ne pas dormir dans le même lit durant quelque temps. s’il te plaît comprends-moi. s’il te plaît
Elle voulait mourir. Mais au bout de longues minutes à se tenir là, sentant sa fureur tourbillonner en elle, elle s’approcha de son mari et le rassura en lui disant qu’elle allait aménager un endroit pour lui dans une autre pièce, qu’ils dormiraient donc séparément mais qu’ils se verraient au petit matin. Elle l’embrassa sur les articulations puis partit préparer son nouveau lit, le tiroir d’un bureau qu’elle n’utilisait pas et qu’elle rembourra avec un oreiller. Il la laissa le porter là sans protester, et ils se séparèrent.
Le son d’un battement frénétique se fit entendre toute la nuit, obligeant Rebecca à se reposer sans sommeil, les yeux rivés sur une tuerie sanglante invisible dans l’obscurité.
L’homme du ministère des Anciens combattants lui dit qu’elle devrait amener Bob au premier groupe de soutien disponible. Il lui indiqua même le nom d’une section locale qui organisait une rencontre le lendemain. Le couple s’y rendit. Il y trouva en tout et pour tout cinq soldats sectionnés à la retraite accompagnés de leurs conjoints, assis en un cercle approximatif sur des chaises pliantes qui avaient dû connaître des événements aussi bien joyeux que tristes : des baptêmes, des rassemblements religieux ou politiques, peut-être même des mises en scène de théâtre amateur, tous se dissipant dans l’air dès que les chaises étaient enlevées, empilées puis renvoyées dans l’anonymat dont bénéficiait le mobilier. L’idée que quelqu’un d’autre ait pu s’asseoir sur le même siège qu’elle, un jour ou une semaine auparavant, sirotant du jus de fruit tout en discutant des décorations du bal de fin d’année de l’école, lui semblait presque inconcevable.
À cette réunion étaient présents cinq fragments d’anciens combattants, ainsi que leurs conjoints ou d’autres membres de la famille ; certains de ces soldats étaient sans doute en meilleure condition que Bob, d’autres tellement plus diminués qu’on hésitait entre hurler d’horreur devant leur état ou avoir un fou rire incontrôlable à cause de la démence que cela représentait. Il y avait un gamin de vingt-deux ans qui s’était retrouvé au casse-pipe moins d’une journée avant qu’un bombardement ne le transforme en une fine bande de visage incluant un œil (aveugle), deux joues, un nez et une partie de la lèvre supérieure, maintenant montée sur le même genre de plaque argentée qui maintenait Bob en vie et que sa mère avait ajustée à un panneau susceptible d’être accroché à un mur. Un autre soldat avait été réduit à un torse dépourvu de membres, d’appareil génital ou de tête. Il était connecté par tous ses moignons à des interfaces argentées. Le troisième participant était une femme bien faite aux ongles délicatement sculptés, vêtue d’une jupe courte conçue pour mettre en valeur une paires de jambes à mourir et un haut destiné à accentuer un décolleté généreux. Chacun de ses gestes transpirait la sensualité, ce qui correspondait peut-être à sa façon d’être avant sa mobilisation, à moins qu’elle ne compense ainsi la perte de la moitié avant de sa tête qui, au lieu de montrer un visage ou une mâchoire ou des yeux, affichait une surface métallique argentée allant d’une oreille à l’autre. On n’avait pu préserver du quatrième individu qu’une pile d’organes internes découpés qu’on avait récupérés à temps et qui étaient maintenant enfermés dans une boîte en argent de la taille d’une mallette, avec un écran de communication ainsi qu’une poignée pour la commodité du mari à l’air sinistre.
Du dernier ancien combattant, il ne restait plus qu’une paire de mains, comme dans le cas de Bob. Sa jolie femme blonde avait résolu le problème consistant à maintenir une relation avec lui : elle s’était fait couper les mains, remplacées par celles de son époux fixées à ses poignets. À cette vue, Rebecca faillit s’enfuir en hurlant. Les disques-mémoire argentés qui délimitaient le point de jonction auraient pu passer pour des bracelets si les pattes calleuses, à la peau plus sombre, poilues et disproportionnées, n’avaient pas ressemblé, au bout de ces bras lisses d’un blanc laiteux, à des gants de dessin animé ; et si elles n’avaient pas entièrement ravi le contrôle de ces membres, qui à présent gesticulaient d’une façon affreusement masculine tandis que la tendre épouse décrivait dans tous les détails comment cette mesure avait sauvé leur mariage. Plus d’une fois durant la réunion, Rebecca surprit ces mains en train de caresser les genoux dénudés sur lesquels elles reposaient, les bras suivant le mouvement de va-et-vient avec une énergie lascive que leur propriétaire admettait et appréciait, mais dont elle semblait totalement étrangère. Rebecca ne put s’empêcher de se demander si son propre mari voulait cela, s’il lui demanderait jamais une telle chose, et si elle finirait par le désirer elle-même.
Le type qui portait la mallette dit aux autres conjoints présents qu’il les trouvait chanceux. Ils avaient retrouvé l’être aimé sous une forme qui pouvait être touchée, de la peau dégageant une chaleur indéniable malgré son côté grandement artificiel, de la chair qui évoquait le souvenir de ce qu’ils avaient vécu ensemble même dans les cas où il était difficile d’obtenir plus. Mais son épouse ? Il montra une photo de la femme qu’elle avait été : une petite chose joufflue, potelée, dotée d’un double menton précoce mais également d’un sourire chaleureux et d’un regard qui semblait exprimer une joie simple causée par quelque plaisanterie personnelle au sens caché. Il leur expliqua qu’elle pouvait le voir grâce à l’interface ou même communiquer avec lui via la tablette-clavier mais qu’elle n’avait jamais été habile avec les mots, même entière ; avant la guerre, c’était une créature aux gestes silencieux, aux sourires conciliants, aux actes de bonté, aux regards expressifs et aux brusques silences orageux. Maintenant, continua-t-il, elle était devenue un sac d’organes qui ne fonctionnait pas et contenait juste assez de chair pour mériter le qualificatif de vivant. Elle lui posait parfois des questions directes, mais restait muette la plupart du temps, lui répondant, quand il la poussait à parler, qu’elle voulait seulement qu’on la laisse tranquille, qu’on la pose sur une étagère et qu’on l’oublie. Il devenait de plus en plus difficile pour lui d’argumenter contre ce vœu.
« Ma femme est morte », affirma-t-il au groupe.
Après un silence choqué, il se répéta à lui-même, avec de l’émerveillement étonné : « Ma femme est morte. Ma femme est morte. »
L’épouse dont les bras se terminaient par les mains de son mari continuait à se peloter.
L’humour noir s’immisça dans la conversation, comme cela se produit toujours entre les survivants d’une perte terrible, lorsque l’homme réduit à une bande de visage mentionna qu’il avait rencontré, à l’hôpital, un type qui avait fini en trou du cul. La femme du torse leur raconta qu’elle avait croisé quelqu’un qui était une vraie bite. Un autre raconta que son lieutenant avait toujours été une petite merde et qu’il l’était sans doute encore. À partir de là, les variations dégénérèrent de plus en plus. Quelques remarques inventives impliquèrent l’avenir des gens sectionnés qui étaient réduits uniquement à leurs organes sexuels ainsi que leurs chances de gagner leur vie après le service, tellement meilleures que celles de n’importe qui d’autre. Mais les plaisanteries choquantes s’épuisèrent vite, remplacées par un silence gêné.
La réunion s’acheva après dix minutes d’organisation visant à déterminer la date de la prochaine rencontre ainsi que la désignation d’une personne chargée de répandre la nouvelle auprès d’autres personnes susceptibles de tirer profit d’une participation à leur groupe. Rebecca se rendit à la table. Sur la nappe en plastique, on avait disposé du café et des gâteaux. Elle resta debout, sans envie de toucher à la nourriture mais désireuse de faire autre chose que de retourner dans une maison et une vie maintenant dominées par le silence. Elle se mit à trembler lorsque le synthétiseur vocal de la femme au visage de miroir argenté, qui s’approchait dans son dos, lui dit : « Vous n’êtes pas seule. »
Rebecca fondit en larmes et accepta l’étreinte de l’autre femme, percevant la chaleur de ses bras mais aussi vivement consciente de la froideur du miroir contre sa joue. Elle voulait lui confier : bien sûr, que je suis seule, et mon mari également, et vous, nous tous ; c’est justement ça, se retrouver en enfer, c’est ce fossé entre nous et le fait que nos efforts pour le combler, même pour un court instant, ne nous apportent rien, à part un répit et l’illusion du soulagement avant que le trou ne se reforme en nous laissant affronter toujours les mêmes problèmes sur nos îlots séparés. Elle désirait le dire, mais s’en sentit incapable ; pas s’il fallait pour cela accepter le désespoir face à la gentillesse de cette femme mutilée. Alors elle pleura jusqu’à ne plus y voir et continua d’accueillir l’étreinte comme le cadeau qu’elle était censée être.
Le samedi soir, le répondeur débordait de messages : la famille et les amis voulaient savoir comment cela se passait et quand ils savoureraient leurs retrouvailles joyeuses. Suivant les désirs de son époux, Rebecca les rappela tous, d’une part pour les remercier, mais aussi pour les décourager, en leur expliquant qu’ils devaient encore s’adapter l’un à l’autre et qu’il leur faudrait trouver un local à louer. De nouveau, beaucoup d’entre eux insistèrent pour connaître l’état psychologique de Bob. Elle se demanda comment donc on pouvait attendre d’elle une réponse à cette question, mais elle leur dit que, oui, il allait bien. Ils lui demandèrent la même chose en ce qui la concernait et elle leur répliqua à nouveau ce qu’ils voulaient entendre : oui, tout allait bien.
Assis ensemble, ils regardèrent les derniers reportages sur la guerre pendant quelque temps. Ils ne réagirent pas à la nouvelle de la mobilisation de cent mille nouveaux soldats, ni au commentaire soulignant que ce ne serait pas suffisant ; ni, plus tard, à la garantie, conçue pour se donner bonne conscience et débitée avec un grand sourire par une journaliste rousse, que les décès comptant comme morts réelles se trouvaient à leur niveau le plus bas de tous les temps. Les mains de Bob pianotèrent sur la tablette en produisant une suite d’insultes en minuscules que Rebecca interpréta comme l’équivalent furieux d’un ronchonnement aigri.
Touchant du doigt les ecchymoses de son cou, elle décida qu’ils ne devaient pas regarder cela. Elle éteignit le poste avec la télécommande puis alla s’asseoir avec lui. Elle percevait – goûtait même – le silence oppressant comme s’il s’agissait de l’atmosphère elle-même, devenue tellement épaisse que chaque instant ressemblait à une éternité passée sous l’eau.
Un peu plus tard, les mains de son mari relâchèrent les siennes pour rejoindre la tablette.
veux-tu que je parte ou penses-tu qu’il nous reste un avenir ensemble
Elle n’en avait aucune idée. Et puis elle pensa à son époux en des temps meilleurs, à cet homme fort, souriant, parfois irritable, avec ce côté coquin qui le transformait de temps à autre en un enfant qui la traitait comme un symbole d’autorité à qui il fallait cacher les bêtises. Elle se remémora les tours qu’il lui jouait pour observer sa réaction du coin de l’œil afin de déterminer si elle trouvait cela exaspérant ou drôle. Elle se souvint de la forme de sa tête au milieu de la nuit, quand les lumières étaient éteintes, qu’il faisait trop sombre pour ne voir autre chose qu’une silhouette et que, éveillé, il la contemplait en ignorant qu’elle non plus n’était pas endormie et qu’elle le regardait. Pour elle, l’ombre de son mari était, dans sa moindre partie, aussi claire que lorsque le jour éclairait ses traits, parce qu’elle le connaissait et qu’elle pouvait compléter les zones obscures. Elle revécut son émotion quand elle lui laissait savoir d’un frôlement de main qu’elle aussi était réveillée. Elle se rappela ses lèvres, ses dents, son contact, sa gentillesse et sa passion. Elle se souvint que, parfois, elle ne bougeait pas, prétendant au contraire être plongée dans le sommeil tout en pensant que se trouvait là son homme, son amant, son ami et, peut-être un jour, le père de ses enfants… et qu’un jour elle s’était sentie si fière d’avoir gagné son amour que son cœur avait manqué exploser.
dis quelque chose
Oui, mais quoi ? C’était tout le problème. C’était une femme orgueilleuse, qui ne voulait pas échouer la première. Sa principale motivation dans sa relation actuelle avec ce qu’était devenu son mari se résumait à son refus obstiné d’abandonner avant lui, et cela ne parlait pas en sa faveur, elle le savait bien. Elle n’était pas poussée par le besoin instinctif, inconditionnel de le soutenir dans son épreuve, mais par la volonté de se montrer la meilleure, la plus forte, celle qui faisait tout correctement et qui tenait bon quand il aurait été plus simple de jouer la salope qui baisse les bras. Peut-être, pensa-t-elle, le chemin du retour se situait-il là ; pas à travers l’amour, mais au moyen d’un amour-propre farouche, inflexible. Si elle réussissait à alimenter ce sentiment, l’autre reviendrait. Mais comment le pourrait-elle, quand cela représentait tellement plus que ce qu’elle parvenait à puiser en elle-même ?
Les mains de Bob recommençaient à taper.
Rebecca, j’ai menti
Elle les regarda et perçut quelque chose d’ineffablement tendu dans leur manière de se tenir contre le clavier.
« À propos de quoi ? »
quoiqu’il arrive je veux que tu saches que je me rappelle beaucoup plus que je ne te l’ai dit. c’est pire que dans les reportages des informations, c’est plus sale et sanglant et loin d’être aussi simple. c’est le genre d’endroit qui te fait oublier qu’il subsiste un peu de bien dans le monde. c’est pour cela que nous sommes si nombreux à vouloir oublier. mais j’ai enregistré ma dernière sauvegarde seulement deux jours avant l’attaque. je me souviens de toutes les choses terribles que j’ai subies là-bas, de toutes les atrocités que j’ai commises. plus tard, quand ils m’ont téléchargé, ils m’ont laissé le choix entre tout garder en mémoire ou revenir à un enregistrement précédent. j’ai presque mis toute cette foutue guerre à la poubelle. mais j’ai décidé de tout conserver parce qu’il le fallait.
Elle le fixa.
« Pourquoi ? »
la seule chose vraiment valable durant tout cette période était tout ce temps passé à ruminer, à vouloir revenir auprès de toi
Cette réponse l’anéantit. Pour la première fois depuis le retour de son époux, elle se laissa sombrer dans son sentiment de perte et poussa un hurlement. Elle s’enfouit le visage dans les mains, ne voyant pas celles de son mari se retirer du clavier pour revenir sur le canapé. Mais elle en sentit le poids sur ses épaules, la force qu’elles possédaient toujours en la serrant là, la gentillesse qu’elles montraient encore tandis que les index lui essuyaient les larmes sur ses joues.
Elle trouva son contact à la fois familier et étranger. Par certains côtés, c’était comme s’il ne l’avait jamais quittée, par d’autres, comme s’il était un inconnu, revenu de la guerre avec seulement de l’amertume et une vague ressemblance qu’il utilisait pour séduire une veuve grâce à d’affreux mensonges où il prétendait être le mari tant attendu. Son poids, sa solidité, le son de sa respiration lui manquaient. Et elle haïssait toujours la sensation glacée des pièces métalliques attachées à ses poignets, si semblables à des chaînes. Mais pour la première fois, elle arrivait à percevoir la présence du garçon dont elle était tombée amoureuse, de l’homme qu’elle avait épousé, du mari qui partageait son lit à la nuit tombée. C’était lui ; contre toute attente, au bout du compte, c’était lui. Et pour la première fois, d’une manière irrationnelle, elle eut envie de lui.
Elle lui dit qu’elle avait besoin d’une minute puis se rendit dans la salle de bain. Elle fit couler de l’eau sur son visage, maudissant son nez rouge et ses yeux bouffis, et se rendit présentable, ou du moins autant qu’elle le put. Elle savait que ce n’était pas le meilleur moment. Elle se sentait terrifiée, pareille à une épave. D’après ce qu’il avait écrit, il ne se sentait pas mieux. Mais il n’y aurait pas un instant plus favorable, pas si elle continuait à l’attendre. Dans la vie, il existe toujours des seuils que l’on doit franchir, quand on le peut, ne serait-ce que pour atteindre ce qui se trouve de l’autre côté.
Lorsqu’elle eut terminé tout ce qu’il était possible de faire, elle revint, embrassa les mains de son mari avant de porter ce qui restait de lui jusqu’au lit. Elle se déshabilla et se glissa dans sa couche. Les mains hésitèrent, saisies d’une soudaine timidité presque touchante, puis elles la rejoignirent à leur tour sous les draps. Dans le noir, elles rampèrent le long de son corps, l’une se dirigeant vers le nord, l’autre vers le sud. Le tissu émit un bruit de froissement. Rebecca s’accorda une dernière pensée analytique : quelle chance elle avait, qu’il lui revienne comme une paire de mains et non sous la forme d’une bande de chair inutile dans une boîte en argent close. Il leur restait encore tant de choses à partager !
Elle ferma les yeux et se détendit, puis laissa son mari lui faire l’amour.
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Parution originale : « Her Husband’s Hands », dans Lightspeed Magazine, Issue 17, octobre 2011
Distribué sous les termes de la licence Creative Commons Paternité – Pas d’Utilisation Commerciale – Pas de Modification 2.0 France
© Adam-Troy Castro, 2012
par Adam-Troy Castro
publié dans N° 06
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Informations
Nouvelle de Adam-Troy Castro Traduction de Bruno B. Bordier
Parution : 11 avril 2012 (inédit)
Numéro :N° 06
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